Attentat de la préfecture de police de paris: le bras de fer d’une policière contre l’état

3 novembre 2023 Chlowebmaster
INFO RMC. Depuis trois ans, Camille*, une policière qui s’est retrouvée face au terroriste lors de l’attentat de la préfecture de police le 3 octobre 2019, se bat pour obtenir la protection fonctionnelle. Le ministère de l’Intérieur lui refuse ce droit prétextant qu’elle n’est pas une victime directe; alors même qu’elle est partie civile dans l’instruction toujours en cours pour association de malfaiteurs terroristes en vue de la préparation de crimes en lien avec une entreprise terroriste.
Article écrit par Marion Dubreuil, paru sur le site web de RMC. à lire ici

 

Camille* était à son poste le 3 octobre 2019, à Paris, quand un de ses collègues a assassiné au couteau quatre autres policiers au sein de la préfecture de police. « Après avoir entendu des cris, elle s’est rendue dans les couloirs de la préfecture et a suivi les traces de sang au sol, explique son avocate Me Elsa Crozatier. Elle s’est retrouvée face à l’assaillant qui portait des coups de couteau à l’un de ses collègues et elle a tenté de porter secours à deux autres collègues blessés. »

Le ministère de l’intérieur estime qu’elle n’est pas une victime directe de l’attentat

Un an après l’attentat, cette brigadière-cheffe a demandé la protection fonctionnelle pour se constituer partie civile dans l’instruction contre X pour association de malfaiteurs terroristes en vue de la préparation de crimes en lien avec une entreprise terroriste.

La protection fonctionnelle impose à l’administration employeur de réparer le préjudice de son agent. Et cela inclut les frais de procédure judiciaires, donc les frais d’avocat. Si l’agent a été blessé ou menacé, il peut également bénéficier d’un remboursement de ses frais de santé.

Camille essuie un premier refus le 19 janvier 2021. Le ministère de l’Intérieur estime qu’elle n’est pas une victime directe de l’attentat, “qu’elle n’a pas fait l’objet d’une atteinte volontaire à son intégrité physique, de violences ou de menaces”, “qu’elle n’a pas été personnellement visée” et qu’elle bénéficie déjà d’un congé pour invalidité temporaire et d’un suivi psychologique en réparation de son traumatisme.

Pourtant, d’après le Code de sécurité intérieur (article R – 434-7) “l’État défend le policier (…) contre les attaques, menaces, violences, voies de fait, injures diffamation et outrages dont il peut être victime dans l’exercice ou du fait de ses fonctions. L’État accorde au policier (…) sa protection juridique en cas de poursuites judiciaires liées à des faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle”.

Un acharnement « incompréhensible »

La policière attaque donc la décision du ministère de l’Intérieur devant le tribunal administratif de Paris, qui lui donne raison le 22 juin 2022. Le ministère de l’Intérieur fait appel de cette décision et perd à nouveau devant la cour administrative d’appel le 23 mai 2023. Le ministère a été condamné à verser 1.500 euros au titre des frais de justice à la policière.

Mais Beauvau n’a pas dit son dernier mot et a déposé un ultime recours devant le Conseil d’État. Un acharnement incompréhensible pour Camille, partie civile à l’instruction en cours et admise au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI). Contacté, le ministère de l’Intérieur n’a pas répondu à nos sollicitations.

À la demande des syndicats de police, Gérald Darmanin avait commandé un rapport à l’inspection générale de l’administration et à la direction générale de la police nationale sur les conditions d’octroi de la protection fonctionnelle dont les conclusions devaient être publiées à la rentrée.

Selon le ministère de l’Intérieur, les pistes d’amélioration devaient concerner « les modalités de saisine de cette protection », ainsi que « la rapidité et l’efficience » du dispositif.

*Le prénom a été modifié